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Frankie Manning

Frankie Manning, souvent appelé le "l'Ambassadeur du Lindy Hop", est une figure emblématique du swing. Il a joué un rôle clé dans le développement du Lindy Hop et est considéré comme l'un des plus grands danseurs de l'histoire. Lorsque l’on demande aux danseureuses de Lindy Hop de citer un nom connu, c’est sans exception celui de Frankie Manning qui sort en premier alors que d’autres noms mériteraient peut-être la même reconnaissance. Alors pourquoi Frankie?



"Toutes les danses, elles viennent de la musique, de la façon dont la musique est jouée. Quand tu Lindy Hop, tu swingues chérie, je te le dis, tu swingues bébé! Je suis un Lindy Hopper Darling, et je swingue!" (traduction libre, "Never stop swinging").

Né le 26 mai 1914 à Jacksonville, en Floride, Frankie Manning a grandi à Harlem, New York.

C'est là qu'il a commencé à danser dans les clubs de jazz, comme le Savoy, où le Lindy Hop était en train de naître.

En 1935, il rejoint la troupe de danseurs Whitey's Lindy Hoppers, qui est rapidement devenue l'une des troupes de danse les plus célèbres du pays. Elle partira même en tournée internationale, popularisant le Lindy Hop dans toute l'Europe jusqu'en Australie.


Moulin Rouge, Paris, 1937. Naomi Waller/Frankie Manning, Lucille Middleton/Jerome Williams, Mildred Cruse/Billy Williams. Studio C.Bracken

"Nous n’étions pas payé mais la foule lançait de l’argent par terre et nous nous le partagions"

De retour à la maison, il danse à l’exposition universelle de New York et apparaît dans plusieurs films, comme “Radio City Revels”, “A Day at the Races”ou “Hellzapoppin”, la plus connue des séquences de Lindy Hop du cinéma aujourd'hui. Le style explosif et athlétique de Frankie y est capturé dans sa plus grande splendeur lors d’acrobaties époustouflantes exécutées avec sa partenaire Ann Johnson.


Chorégraphié par Frankie lui-même, la routine aurait dû être exécutée sur “Jumpin’ at the Woodside” composition de Count Basie, mais les musiques ont été changées lorsque les studios ont refusé de payer l’artiste pour sa contribution.

Visionnez ici la séquence avec la musique originelle:




Deuxième carrière

Après la Seconde Guerre mondiale, la popularité du Lindy Hop décline. Frankie Manning prend une pause (qui durera 30 ans!) et travaille comme postier à New York. C’est à la fin des années 80 où grâce à ce qui est aujourd'hui appelé à tort le “swing revival”(1), qu’il reçoit un téléphone qui changera sa vie:

- Bonjour, êtes-vous Frankie Manning le danseur? - Non, je suis Frankie Manning, l'employé de poste. - Oui mais vous dansiez à l’époque? - Oui je dansais… mais je ne danse plus maintenant…

A l’autre bout du fil, Erin Stevens, professeure de danse et fan de swing. Elle convainc Frankie de la rencontrer et de lui montrer quelques pas et très vite, les choses s’emballent… d’autres danseureuses enthousiastes d'Angleterre et de Suède s’investissent dans l’aventure et invitent Frankie à venir enseigner dans leurs événements, débutant ainsi une nouvelle phase de l’histoire du Lindy Hop.


Frankie dansant avec Erin

En 1989, il reçoit le prix le plus prestigieux du monde théâtral, un Tony Award pour son travail de chorégraphe dans la revue de Broadway “Black and Blue”.

En 1992, il entraîne Denzel Washington pour une scène de Lindy Hop dans le film “Malcom X”, dans lequel il apparaît aussi. “Nous essayions juste de le suivre” se rappelle l’acteur.




Ambassadeur

Frankie Manning était non seulement un danseur talentueux, mais aussi un ambassadeur de la danse. Il a travaillé inlassablement à la propagation du Lindy Hop dans le monde entier, participant à des événements internationaux et enseignant aux danseureuses avancé.e.s comme aux débutant.e.s. Sa passion pour la danse était contagieuse, et il a inspiré de nombreux·ses danseureuses à suivre ses traces.


Dans les vidéos de ses cours, l’énergie de Frankie, sa patience et son sens de l'humour sont constamment perceptibles. Avec ses blagues, il fait rire toute la classe. Il encourage l'expression personnelle et la création individuelle, mais ce qui ressort le plus, c'est son amour pour le partage de la danse. Pour certain·e·s danseureuses actuel·le·s la priorité est l’apprentissage de techniques compliquées, de comptes précis, mais ce que Frankie croyait et voulait transmettre avant tout c’était une philosophie, celle du bonheur de danser.



"Si tu savais danser, tu dansais dès le moment où tu entrais dans la salle. Si tu ne savais pas danser, tes pieds commençaient à taper, tes doigts à claquer et ta tête à dodeliner et avant même que tu t’en aperçoives, tu dansais"


Heritage

Frankie Manning a voulu construire une communauté de danseureuses vibrante. Une communauté qui parle de jeux plus que de technique. Il a montré à tou·te·s que cette danse c’est surtout l’écoute consciente de la musique, sans mouvements intriqués ou flashy, juste en dansant ce que la musique inspire. Une écoute que l’on partage avec un·e partenaire comme on partage une discussion passionnée.


A 94 ans, quelques mois avant sa mort, dans le documentaire biographique “Never Stop Swinging” il déclare:

"Je cesserai de danser lorsque mes pieds ne bougeront plus! Si tu veux faire de vieux os, fais du Lindy Hop, parce que moi je suis toujours là!"


Lors de la planification de la célébration de son 95ième anniversaire, Frankie, entouré des organisateurices de l’événement créent la “Frankie Manning Foundation” qui a pour but de faire connaître l’histoire du Lindy Hop, de préserver son patrimoine et de soutenirs les danseureuseureuses africain·e·s-américain·e·s. Malheureusement, Frankie décède quelques jours avant la fête mais sa fondation a continué son développement et fait actuellement un travail remarquable. On vous encourage à aller voir sur leur site et, si vous le pouvez/voulez à faire un don pour soutenir son activité.



Merite ou chance?

Frankie Manning mérite indiscutablement la reconnaissance. Les raisons de sa célébrité ne sont pourtant pas uniquement dûes à son talent. L'histoire du Lindy Hop a été racontée en glorifiant des hommes, comme lui, au détriment des femmes qui ont également contribué de manière significative au développement de cette danse.


Par ailleurs, d’autres danseureuses tout autant talentueux·ses ont été contacté·es à la même époque mais ont décliné l'invitation par manque de disponibilité, la danse n’étant plus leur gagne-pain. Le manque de reconnaissance des racines africaines-américaines et du respect de sa transmission ont aussi pu être des freins pour certain·e·s de ces artistes qui ne voulaient pas “trahir” leur communauté et encourager une appropriation d’un de leur art.



Aujourd'hui, il est important de redécouvrir les nombreuses autres personnes qui ont contribué de manière significative à cette danse et de raconter leur histoire pour une compréhension plus complète.

Si vous voulez en savoir plus, creuser un peu le sujet de façon critique, un webinaire intitulé “la déification de Frankie Manning” à été organisé par Ilindy:




Heritage bis... évolution des points de vue

Frankie, autant dans ses vidéos de jeunesse pleines d’aerials vertigineux que lors des cours qu’il donne dans sa neunantaine, a su nous transmettre les raisons qui nous font rester ou revenir sur la piste de danse: danser fait se sentir vivant.e, danser fait se sentir heureux-euse.


Aujourd'hui, avec l’envie grandissante de la scène swing de “faire mieux” concernant la reconnaissance des racines du Lindy Hop, la joie prônée par Frankie comme une caractéristique principale de la danse ne suffit plus. Le contexte de la naissance du Lindy Hop n’est pas joyeux. Comme le disent nos ami·e·s organisateurs·ices du festival Shake That Lake à Genève:

Le swing incarne le bonheur ET bien plus encore... il parle de résistance, d'oppression, de doutes, de solitude, de la force de la communauté... c'est une forme d'art étonnante et complexe née de l'expérience afro-américaine, capable d'exprimer toute la gamme des émotions humaines.

Frankie Manning, Sydney, 1938

Redaction: Hülya Kubbecioglu


Notes (1) A cette période, la musique et les danses Swing sont de nouveau à la mode (avec aussi l’apparition de l’électro-swing). Mais appeler cette période “renaissance” c’est laisser croire à tort que le swing avait disparu. Il était certes pratiqué par moins de monde mais il a continué d’être célébré dans les communautés africaines-américaines. Sources


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